Mittwoch, 13. Juni 2007
Interview | Entrevue Le Feu
perspectives, 12:34h
Entretien réalisé dimanche 10 juin avec Balazs Gera et Guillaume Gilliet, respectivement metteur en scène et interprète du spectacle Le Feu de Barbusse.
Journal du Festival: Présentez-nous votre compagnie.
Balazs Gera: La compagnie est née il y a douze ans en Lorraine. Elle n´a pas de troupe permanente, mais entretient des fidélités comme avec Guillaume Gilliet avec lequel je travaille depuis plus de dix ans. Nous nous intéressons aux sujets historiques et politiques. Il s´agit autant de l´Histoire que des histoires individuelles prises dans la tourmente des événements politiques.
Pour ce spectacle, intitulé "Le Feu", il s´agit d´une commande du Conseil Général de la Meuse pour les commémorations de la bataille de Verdun dont on fêtait, l'an dernier le 90ième anniversaire. C´est la première fois que ce spectacle va être joué devant un public allemand.
Guillaume Gilliet: L'auteur du texte que je joue est Français. C'était un intellectuel qui s'est volontairement engagé pour témoigner. Il aurait pu rester à l´abri comme de nombreux bourgeois. Il met un point d´honneur à rapporter les sensations et la vie quotidienne des soldats dans les tranchées. C´est leur porte parole. A un moment dans le texte, un soldat dit "nous oublierons nous aussi, il ne restera plus que les mots". Ce sont donc ces mots que nous transmettons aujourd´hui.
B.Gera: Le succès de ce roman à l´ époque de sa publication en 1916 a été largement dû également à l´emploi par l´auteur des dialectes régionaux. Ce qui a été très important pour l´adaptatrice, Delphine Jaillot, avec laquelle nous avons travaillée. Cependant très vite, au delà des mots, nous nous sommes concentrés sur l´image du soldat transformé en bête féroce au moment de "monter au feu".
Nous avons retenu un chapitre du livre, intitule "le feu", qui a donné ensuite son titre au roman et à notre spectacle. Ce qui compte c´est cette course de l´homme qui "monte au feu", ce qu´il devient à ce moment précis où il va attaquer le camp ennemi. Qu´il soit français ou allemand, c´est la même chose. D ailleurs dans le spectacle de rares indices du costume montrent que le personnage est "un poilu", comme on appelait les soldats français de cette guerre, mais il pourrait aussi bien être allemand, ou même d´une autre guerre.
JF: Pourquoi jouez vous ce spectacle sur une péniche?
G.Gilliet: C´est une proposition du festival… Mais nous avons également joué dans des endroits chargés de signification, sur des anciens champs de bataille comme la Butte de Vauquois ou le Kaisertunnel. Le plus troublant, c´est de jouer dans une nature qui a beaucoup évolué depuis les événements. On ne voit plus de trace de la première Guerre Mondiale mais on sait qu´autour de nous de nombreuses âmes mortes rôdent. Le fait aussi de le jouer aujourd´hui pour la première fois, je le répète, devant un public allemand va sans doute être lourd de significations. Qu´est ce que cela va me faire de crier "sales Boches" au moment où les soldats montent au feu? Evidemment, nous nous demandons aussi comment le public allemand va accueillir le spectacle, quelle curiosité ils pourront y trouver.
JF: Pourquoi avoir interdit le spectacle aux moins de 13 ans?
B.Gera: Tout d´abord la langue est assez complexe. Puis c´est un spectacle assez violent : vous me direz que les jeunes de moins de 13 ans sont exposés à la violence mais je vous répondrai que la violence au théâtre est différente. Nous avons choisi l´âge de treize ans, car c´est l´âge auquel, en France, on commence à évoquer les événements de la Première Guerre Mondiale dans les programmes scolaires et où l´on commence aussi à lire Henri Barbusse.
texte: Justine Wanin
Zusammenfassung in deutscher Sprache
Historische und politische Themen stehen im Mittelpunkt der Arbeit von Regisseur Balasz Gera und Schauspieler Guillaume Gilliet. Seit 10 Jahren arbeiten sie gemeinsam und richten dabei ihren Blick auf die große Geschichte und auf individuelle Geschichten, erfasst im Wirbel politischer Ereignisse.
„Le Feu“ ist eine Auftragsarbeit für das „Conseil Général de la Meuse“ zum 90. Jahrestag der Schlacht von Verdun. Autor Barbusse, französischer Intellektueller, ist als französischer Soldat Zeitzeuge des Ersten Weltkriegs. Mit seinem Text wird er zum Sprecher der Soldaten in den Schützengräben – denn nach dem Verlust ihrer Erinnerung bleibt nichts als das geschriebene Wort.
Die Inszenierung konzentriert sich auf das Bild des Soldaten, der sich im Moment des Angriffs auf das feindliche Lager in ein wildes Tier verwandelt. Was passiert in diesem Moment? Ob Deutscher oder Franzose mache dabei keinen Unterschied, so Regisseur Gera.
Das Schiff „Maria-Helena“ als Spielstätte für „Le Feu“ ist zufällig gewählt. Gilliet beschreibt allerdings die beängstigende Stimmung, die ihn erfasste, als das Stück an historischer Stätte auf den früheren Schlachtfeldern gespielt wurde: Die veränderte Landschaft, die den Ersten Weltkrieg vergessen lässt, verbindet sich mit dem Wissen um die unter einem vermodernden Leichen.
Im Rahmen des Festivals Perspectives wird „Le Feu“ erstmals vor deutschem Publikum gespielt. Schauspieler Guillaume Gilliet erwartet mit Spannung die Reaktionen des Publikums. Und auch seine eigenen Gefühle, wenn er das Publikum mit „Sales boches“ – „Dreckige Deutsche“ – beschimpft.
Text: Hannah Kabel
Journal du Festival: Présentez-nous votre compagnie.
Balazs Gera: La compagnie est née il y a douze ans en Lorraine. Elle n´a pas de troupe permanente, mais entretient des fidélités comme avec Guillaume Gilliet avec lequel je travaille depuis plus de dix ans. Nous nous intéressons aux sujets historiques et politiques. Il s´agit autant de l´Histoire que des histoires individuelles prises dans la tourmente des événements politiques.
Pour ce spectacle, intitulé "Le Feu", il s´agit d´une commande du Conseil Général de la Meuse pour les commémorations de la bataille de Verdun dont on fêtait, l'an dernier le 90ième anniversaire. C´est la première fois que ce spectacle va être joué devant un public allemand.
Guillaume Gilliet: L'auteur du texte que je joue est Français. C'était un intellectuel qui s'est volontairement engagé pour témoigner. Il aurait pu rester à l´abri comme de nombreux bourgeois. Il met un point d´honneur à rapporter les sensations et la vie quotidienne des soldats dans les tranchées. C´est leur porte parole. A un moment dans le texte, un soldat dit "nous oublierons nous aussi, il ne restera plus que les mots". Ce sont donc ces mots que nous transmettons aujourd´hui.
B.Gera: Le succès de ce roman à l´ époque de sa publication en 1916 a été largement dû également à l´emploi par l´auteur des dialectes régionaux. Ce qui a été très important pour l´adaptatrice, Delphine Jaillot, avec laquelle nous avons travaillée. Cependant très vite, au delà des mots, nous nous sommes concentrés sur l´image du soldat transformé en bête féroce au moment de "monter au feu".
Nous avons retenu un chapitre du livre, intitule "le feu", qui a donné ensuite son titre au roman et à notre spectacle. Ce qui compte c´est cette course de l´homme qui "monte au feu", ce qu´il devient à ce moment précis où il va attaquer le camp ennemi. Qu´il soit français ou allemand, c´est la même chose. D ailleurs dans le spectacle de rares indices du costume montrent que le personnage est "un poilu", comme on appelait les soldats français de cette guerre, mais il pourrait aussi bien être allemand, ou même d´une autre guerre.
JF: Pourquoi jouez vous ce spectacle sur une péniche?
G.Gilliet: C´est une proposition du festival… Mais nous avons également joué dans des endroits chargés de signification, sur des anciens champs de bataille comme la Butte de Vauquois ou le Kaisertunnel. Le plus troublant, c´est de jouer dans une nature qui a beaucoup évolué depuis les événements. On ne voit plus de trace de la première Guerre Mondiale mais on sait qu´autour de nous de nombreuses âmes mortes rôdent. Le fait aussi de le jouer aujourd´hui pour la première fois, je le répète, devant un public allemand va sans doute être lourd de significations. Qu´est ce que cela va me faire de crier "sales Boches" au moment où les soldats montent au feu? Evidemment, nous nous demandons aussi comment le public allemand va accueillir le spectacle, quelle curiosité ils pourront y trouver.
JF: Pourquoi avoir interdit le spectacle aux moins de 13 ans?
B.Gera: Tout d´abord la langue est assez complexe. Puis c´est un spectacle assez violent : vous me direz que les jeunes de moins de 13 ans sont exposés à la violence mais je vous répondrai que la violence au théâtre est différente. Nous avons choisi l´âge de treize ans, car c´est l´âge auquel, en France, on commence à évoquer les événements de la Première Guerre Mondiale dans les programmes scolaires et où l´on commence aussi à lire Henri Barbusse.
texte: Justine Wanin
Zusammenfassung in deutscher Sprache
Historische und politische Themen stehen im Mittelpunkt der Arbeit von Regisseur Balasz Gera und Schauspieler Guillaume Gilliet. Seit 10 Jahren arbeiten sie gemeinsam und richten dabei ihren Blick auf die große Geschichte und auf individuelle Geschichten, erfasst im Wirbel politischer Ereignisse.
„Le Feu“ ist eine Auftragsarbeit für das „Conseil Général de la Meuse“ zum 90. Jahrestag der Schlacht von Verdun. Autor Barbusse, französischer Intellektueller, ist als französischer Soldat Zeitzeuge des Ersten Weltkriegs. Mit seinem Text wird er zum Sprecher der Soldaten in den Schützengräben – denn nach dem Verlust ihrer Erinnerung bleibt nichts als das geschriebene Wort.
Die Inszenierung konzentriert sich auf das Bild des Soldaten, der sich im Moment des Angriffs auf das feindliche Lager in ein wildes Tier verwandelt. Was passiert in diesem Moment? Ob Deutscher oder Franzose mache dabei keinen Unterschied, so Regisseur Gera.
Das Schiff „Maria-Helena“ als Spielstätte für „Le Feu“ ist zufällig gewählt. Gilliet beschreibt allerdings die beängstigende Stimmung, die ihn erfasste, als das Stück an historischer Stätte auf den früheren Schlachtfeldern gespielt wurde: Die veränderte Landschaft, die den Ersten Weltkrieg vergessen lässt, verbindet sich mit dem Wissen um die unter einem vermodernden Leichen.
Im Rahmen des Festivals Perspectives wird „Le Feu“ erstmals vor deutschem Publikum gespielt. Schauspieler Guillaume Gilliet erwartet mit Spannung die Reaktionen des Publikums. Und auch seine eigenen Gefühle, wenn er das Publikum mit „Sales boches“ – „Dreckige Deutsche“ – beschimpft.
Text: Hannah Kabel
... comment